Abus de pouvoir, une œuvre de Yoann Bourgeois, directeur du Centre Chorégraphique National de Grenoble.


Il y a quelques jours, une vidéo anonyme a commencé à tourner sur les réseaux sociaux. Intitulée L’usage des œuvres, ce film de 10 min est composé d’un montage d’extraits de pièces.



En haut, des œuvres de Chloé Moglia & Mélissa Von Vépy (En suspens, 2007), Lucien Reynes (Rev, 2010 ; Plateau ballant, 2006), Jorg Müller (Noustube, 2001), Camille Boitel (Ouverture de saison, 2017 ; L’immédiat, 2009, Tournage de Hors piste, 2016 ; L’Homme de Hus, 2002), Jean- Baptiste André (Intérieur nuit, 2004), Collectif Petit Travers (Pan-Pot ou Modérément chantant, 2009) et Pierre Pélissier (Monsieur Culbuto, 1997).

En bas, certaines pièces de Yoann Bourgeois qui reprennent des « motifs » des pièces mentionnées ci-dessus dans Minuit (2014), Celui qui tombe (2014), Ophélie (2018), The Mirage of The Symphony (2019), Little Song (2019), Scala (2018), Les paroles impossibles (2020), I wonder where the dreams I don’t remember go (2020), L’art de la fugue (2011), Fugue Balle (2010) et Culbuto (2017).

Dans un récent communiqué, le chorégraphe fait valoir un « usage des motifs » qui fonde, selon lui, une histoire commune du spectacle vivant et spécifiquement ici, une histoire du cirque. À y regarder de près, ces « motifs » sont la reprise intégrale de scènes (concepts, gestes, costumes, accessoires, scénographie ) crées par d’autres. On peut également parler de rapport de force dans ce pillage puisque les artistes concerné·es par ce plagiat n’ont pas toujours la reconnaissance octroyée à la compagnie de Yoann Bourgeois. Cette même compagnie bénéficie de subventions publiques et du soutien des tutelles depuis de nombreuses années par l’intermédiaire d’expert·es censé·es (re)connaître les œuvres des compagnies contemporaines et défendre les auteur·rices du cirque contemporain.

Ironie complète, Yoann Bourgeois ne se contente pas de justifier ses procédés de manière discutable, il va jusqu’à considérer le plagiat – qu’il ne nomme jamais comme tel – de « petites querelles » , et invite de façon condescendante à « aiguiser la pensée sur le geste d’auteur ». C’est lui qui, de sa place de directeur de Centre Chorégraphique National, renvoie à des problèmes d’égo celleux dont il a repris le travail sans jamais les citer, allant jusqu’à inverser les rôles pour se décrire en victime, alors même qu’il occupe une position de pouvoir dans le paysage du spectacle vivant actuel.

Pour l’instant, seule Chloé Moglia s’est exprimée publiquement, questionnant l’assimilation dont son travail a été l’objet dans le travail d’un autre. Ce qui nous touche surtout dans son témoignage, c’est d’admettre qu’un silence collectif a entouré les pratiques abusives de Yoann Bourgeois. Par peur ou par impossibilité de lutter contre celui qui occupe une position dominante, légitimée par ses pairs et par les institutions qui l’ont porté. Mais à qui profite ce silence ?

Parce que sa carrière s’est faite en partie par la pratique répétitive du plagiat portée par un système qui autorise cet abus parmi tant d’autres d’exister, nous demandons la démission de Yoann Bourgeois et, à sa place, la nomination de tou·tes les personnes qu’il a plagié·e·s.

La Permanence

Notes :
Communiqué de Yoann Bourgeois 

Article de Chloé Moglia


La Permanence est un collectif de travailleurxses de la danse et de la performance. Crée en 2017, nous sommes un groupe de personnes antiracistes, transféministes et anticapitalistes. Nous luttons pour que cessent les abus de pouvoirs dans le secteur chorégraphique et pour visibiliser des pratiques militantes dans le champ de l’art. Pour nous contacter : lapermanence@protonmail.com